lundi 14 avril 2014

Tu y penses trop...

Il y a cette fameuse phrase qu'on a TOUTES entendues au moins une fois (que les épargnées se manifestent, j'aimerais connaitre leur secret !!) et qui nous irrite tant. En tout cas, moi c'est le cas. Quand je regarde en arrière, je me rends compte que dès le moment où l'on a souhaité un enfant mon homme et moi, c'est devenu omniprésent. Un sujet de réflexion et de rêvasserie bien plus intéressant que tout le reste et notamment que le boulot parfois.

Les 6 premiers mois, j'étais certaine d'être enceinte à chaque cycle. Le premier mois, j'avais des nausées, l'odorat décuplé, j'ai fait un test dans les toilettes de mon service hospitalier parce que j'étais de garde le soir du 28ème jour. Mon premier négatif. Mais je n'aurais jamais imaginé à ce moment là que ça puisse être si long. Le temps avait pris une dimension élastique, depuis qu'on attendait l'enfant, il s'était étiré et chaque jour me semblait long. Pourtant, rien n'avait changé, mon amoureux était merveilleux, ma famille pleine de vie, mon boulot passionnant... Le quotidien était le même mais le désir d'enfant avait pris une très grande place, mais une belle place, une place tout prêt de l'amour, un beau rêve. Je contemplais le doudou offert par mon homme le jour du début des essais, bébé serait bientôt là pour en profiter.

Et puis entre 6 mois et 1 an d'attente, les diagnostics nous sont tombés dessus. J'ai franchement déprimé, voire paniqué. J'étais en colère chaque jour, mes pensées étaient complètement focalisées sur cette attente stérile. Les relations sexuelles programmées cassaient toute spontanéité. L'angoisse chaque jour m'envahissait et on me disait qu'il fallait que je sois patiente, que je ne m'inquiète pas, que ce n'était pas si grave, que j'y pensais trop... Oui, mais la médecine nous avait pourtant dit que ce serait difficile, mais c'est comme si personne ne réalisait combien pour nous, le monde s'effondrait. Il a fallu du temps avant qu'autour de nous, les autres réalisent que c'était une vraie souffrance, une inquiétude fondée et pas seulement un caprice.


Et puis est venu le temps de l'action. Les examens, les inséminations, les FIV, les fausses couches... Que d'énergie dépensée. Mais la colère se transformait en révolte, et en détermination. Bien souvent le découragement pointait son nez, mais il y avait toujours une échéance à laquelle se rattraper. Bizarrement, le temps est passé plus vite, rythmé par les essais.

Le dire m'est douloureux parce que ma peine est encore immense... Mais, alors que le temps s'allonge, je me sens moins mal maintenant qu'il y a 1 an. Il y a 1 an, quand je parlais avec des personnes souffrant d'infertilité, elles me disaient parfois qu'à force, on s'habitue. Je ne voyais vraiment pas comment on pouvait, je n'arrivais pas à imaginer que ma souffrance puisse s'amoindrir. Je ne dirais pas qu'elle est moindre aujourd'hui, mais je la tolère mieux. En grande partie parce que même si j'y pense beaucoup, c'est moins obsessionnel. La tristesse m'envahit moins.

J'avais envie d'en témoigner pour ceux qui seraient dans la même situation que nous il y a un ou 2 ans. Parce que même sans que l'enfant vienne, le désespoir se fait un peu moins pesant avec le temps. Sans doute parce que je crois encore à la PMA, la plupart du temps, sans doute parce que j'ai appris que le temps de la PMA est lent et que lutter est épuisant. Sans doute que je veux vivre pour ne pas regretter, sans doute que je ne veux pas m'effondrer pour être en mesure d’accueillir un enfant s'il vient un jour.

Je crois qu'on est obligées de passer par cette phase obsessionnelle, par cette immense colère ou tristesse, parce que c'est un deuil... Et ça, j'ai le sentiment que quand on le traverse, l'entourage démuni ne le comprend pas. Je ne crois pas qu'on puisse faire l'économie de cette étape. Vous en pensez quoi vous?

20 commentaires:

  1. coucou!

    je n'ai pas encore autant de recul sur la PMA que toi car on y est que depuis 7 mois, ça a pas trainé et on a fait 4 IAC... je pense qu'on est encore dans la phase deuil de l'enfant couette et phase d'acceptation de notre infertilité. La souffrance est tjs présente... pourquoi nous? pourquoi? mais effectivement pour ne pas sombrer il faut s'accrocher à d'autres élément postifs de notre vie: le taf, notre homme....

    des bisous

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    1. Passer les phases n'est pas linéaire je crois, parfois on croit accepter puis la colère revient violemment... Bisous :)

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  2. je suis également dans une phase où ce désespoir là est moins présent, surement car on a perdu trop de temps à être triste, et qu'aujourd'hui, on souhaite tt de même profiter des bonheurs de la vie, car malgré tout elle passe très vite, avec ou sans enfants. On s'aime, et cette chance là, on veut la savourer.
    De gros bisous <3

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    1. Tu es costaud Zelda, à travers tes écrits je te trouve vraiment dans un mouvement de vie :) J'espère que bientot un petit vous rejoindra...

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  3. Je suis plutôt d'accord. Je trouve que la période la plus difficile pour moi, c'était entre nos 1 an d'essais et le début des IAC, soit environ 10 mois.
    10 mois très durs.
    A ce moment-là, personne ne nous prenait au sérieux, personne ne reconnaissait notre souffrance, et je me sentais extremement mal.

    Une fois les 2 ans d'essais atteints, j'ai eu l'impression qu'enfin, ma souffrance était légitime aux yeux des autres. Une fois les IAC lancées, j'ai eu enfin l'impression d'agir.
    C'est toujours très très dur actuellement bien sûr.
    Mais on apprends à vivre avec...

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    1. Oui, on apprend... doucement... Parfois j'ai peur que ce soit de la résignation, mais on va appeler ça acceptation...

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  4. Bien que nous ayons des parcours et pathologies différentes, nous avons le même nombre de mois d'attente en commun (arrêt fin aout ici). Et je dois bien t'avouer, que tes mots me parlent. Je pense que plus que les possibilités devant, c'est le temps qui s'est écoulé qui me fait ressentir les mêmes sentiments. Il y a eu la colère et la révolte, intense et destructrice, de celle qui aurait pu briser deux âmes et un couple, de celle qui je le pense aussi fait partie du deuil. De celle aussi qui met de côté les amitiés destructrices et toxiques. De celle qui marque les étapes d'une vie. Etape indispensable vers une acceptation, un "plan B, C D ou Y", un renouveau. Etape que j'ai très mal vécue, tout comme tu l'exprimes, mais qui tout comme toi me permet de renouer avec moi, et d'accepter ce moi, aujourd'hui, même si bien sûr je lui en veux encore à ce "destin infertile", même si l'inconnu est devant. Les proches souhaitant fermer les yeux et lançant les phrases assassines, ayant tous procréer et accoucher depuis, commence à comprendre que le temps défile et que rien ne change ici. Il commence à émettre l'idée que ce n'est pas rien, qu'il y a un "vrai" problème, chose impensable tant cela est "facile" de procréer pour eux. Il aura fallu 2 ans et demi révolus pour que l'écoute commence à poindre, même si la compréhension n'est pas. Je ne suis pas encore prête à pardonner, j'ai besoin de temps, la fragilité est toute proche, et à force d'attendre on apprend à se connaitre. A eux de faire preuve de compréhension et de patience, car eux qui commencent à souffrir ne doivent pas oublier que les principaux sans enfants se sont bien nous. N'inversons pas ce rôle. Nous avons d'autres rôles sur d'autres sujets, mais celui là est épidermique. (Bref, fin de l'aparté. Je ne sais pas si tu ressens également cela ?).
    Je vous souhaite pour les jours de devant de rester soudé car c'est votre couple, votre unisson qui a les réponses, même si cela prend du temps... encore et encore... je te souhaite que ce soit plus apaisé. Et je trouve que ta vision et tes conseils sont précieux. Bises

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    1. Je deviens plus indulgente à vrai dire avec le temps envers mon entourage... J'excuse beaucoup leur maladresse, je crois que la tristesse est vraiment quelque chose de contagieux que les gens fuient. Mais tu as raison, ceux qui sont sans enfant, ce sont nos couples... Et nous en sommes très éprouvés même si sans doute enrichis aussi. J'espère que le temps va continuer à aller vers l'apaisement, et pas l'inverse :)

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  5. C'est tout à fait vrai pour moi aussi ! Les 1ers mois ont été les + longs. Au diagnostic, j'ai paniqué, j'étais abattue, le chemin me paraissait une torture ! Au fil du temps, on se fait au temps de la PMA, et puis oui, on s'habitue à l'infertilité, même si les échecs sont douloureux.
    Des bises !

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    1. Si on m'avait dit au départ que ca durerait au bout de 3 ans (bientot), point d'enfant il n'y aurait, je ne me serais jamais cru capable de survivre... Comme quoi :) Oui, les échecs sont terriblement douloureux néanmoins...

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  6. J'ai eu les mêmes phases que toi... Les 6 premiers mois chargés d'espoir avec une certitude d'être enceinte à chaque cycle, des symptômes de fou... (alors qu'on savait dans un coin de nous que quelque chose clochait). S'en est suivie une année d'examen pendant lesquels on ne trouvait pas de zozos, mais on était persuadé d'aller en FIV et que la 1ère fonctionnerait... Puis 3 FIV. Je suis restée pour ma part dans la phase obsessionnelle. Parcours peut être pas assez long. Nous avons zappé la phase IA. 3 ans de parcours, mais une obsession intacte du 1er au dernier jour...
    Courage, ait encore confiance en la PMA. Elle peut faire beaucoup de choses. J'espère sincèrement qu'elle saura vous donner ce cadeau... Bisous

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    1. Je ne dis pas que l'obsession es totalement vaincue hein :) Mais moins violente disons :) J'espère oui, j'espère de tout mon être, mais je ne suis sure de rien...

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  7. J'avais utilisé exactement la même image pour un de mes postes... comme quoi cela représente bien notre état d'esprit...
    Je suis désolée de te lire triste, même si la peine semble s'amoindrir. J'espère que le fardeau continuera de s'alléger et surtout je vous souhaite fort fort de voir cette attente "récompensée". des bises

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    1. Comment ne pas être triste hein :)? La tristesse est toujours dans un petit bout de mon coeur, mais elle n'envahit plus tout :) Merci Milie...

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  8. Il y a malheureusement plusieurs phases par lesquels on passe entre l'excitation, l'attente l'espoir, la joie, la tristesse... C'est un yoyo permanent qu'il faut essayer d'apprivoiser et de vivre avec... Malgré mes nombreuses années de traitement j'avais la tête tellement dans le guidon et me disais toujours qu'il y aurait d'autres possibilités que finalement c'est maintenant le plus dur après avoir presque tout tenté... Quant à mon entourage il est totalement largué et déconnecté de ma réalité aussi je me suis murée dans le silence car avec eux c'est trop lourd... J'espère que cette biopsie va te permettre de pouvoir avancer et que tu vas pouvoir vite repartir avec un traitement sur mesure qui sera couronné de succès.

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    1. Oui, c'est pourquoi je mettais le bémol du "j'y crois encore"... Si la PMA ne nous aide pas in fine, je ne sais pas comment j'y arriverais, je ne suis pas certaine de retrouver la joie de vivre que j'ai toujours eu... J'imagine ta souffrance, ta détresse qui doit être immense... Merci de ton message... J'espère qu'un chemin de paix s'ouvrira pour vous... Je n'ose me projeter au moment où je ne pourrais plus espérer.

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  9. Je vais répondre à ta question !!!
    J'ai "enfin !" la "grande chance" d'appartenir à la catégorie des épargnées du "c'est dans ta tête" !!! Héhéhéh !
    Va savoir pourquoi... Je me "dinosaurise" sans doute et plus personne ne croît que ça puisse être dans ma/nos têtes. Après tant d'années, ça ne peut plus être dans la tête...
    Non, c'est dans mes ovaires et dans mon utérus que ça coince...
    Bref...
    Ton billet me parle, ma Lisette. Il explique bien le cheminement et surtout toutes les phases et les angoisses par lesquelles nous passons... et ce temps qui passe... inexorablement...
    Je pense que ta souffrance est intacte. C'est juste que tu l'acceptes peut-être un peu "mieux".
    Si on m'avait dit au tout début de nos essais que 5 ans plus tard, on en serait au point 0... je ne l'aurais pas cru... je ne l'aurais pas supporté...
    Et là, bizarrement, j'ai comme l'impression que je peux survivre à "ça"...
    Bref, tout ça pour dire que je suis d'accord avec tout ce que tu dis. même si c'est encore horriblement dur et douloureux.
    Perso, je pense être un peu plus "à l'aise" avec l'idée qu'effectivement, je peux, aujourd'hui, imaginer réfléchir "sérieusement" à une vie sans enfant...
    Je t'embrasse, ma Lisette. Plein de courage pour vendredi.

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    1. C'est dans votre tête, heureusement, je n'y ai eu le droit qu'une fois, mais je trouve ça insupportable. Oui, on tolère cette tristesse, elle ne prend plus toute la place, mais elle n''est pas partie pour autant... C'est fou comme le temps est nécessaire... Moi je ne peux pas encore imaginer une vie sans enfant, pour le moment, ça me semble au dessus de mes forces. Merci ma Lulu de m'écrire, et d'être là... Je t'embrasse et je penserais à toi la semaine suivante...

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  10. c'est vrai qu'on y pense trop mais comment faire autrement. Ca fait partie de nos vies et les échecs sont là qu'on y pense ou pas. Il y a des moments où c'est plus facile de penser à d'autres choses mais il y aura toujours unJ1 pour y revenir, une annonce de grossesse pour être triste ou pire un rêve ou cauchemar pour te harceler même quand tu dors.
    bises

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    1. Je trouve qu'y penser, c'est bien normal, mais quand il n'y a plus que cette pensée, c'est insupportable... Mais oui, chaque échec fait resurgir la tristesse et c'est si dur... Bisous

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Une petite prose ?